• Ces cinq films vont vous étonner

    / Prongs dans son extrême gentillesse publie cet article, mais ce que vous lirez plus bas sort de l'esprit tordu de Manon, qui n'a pas le time de publier ses propres articles, donc qui m'utilise moi comme esclave / 

        Je vais vous présenter cinq films les amis, et ils sont français, ce qui n’est absolument pas un souci sinon un point commun. On parle du « cinéma français » et tout de suite des connotations apparaissent, alors qu’il ne devrait être un facteur d’identification comme un autre, et non pas impliquer des choses au préalable sinon pour indiquer son origine. Oui ils ont été réalisés en France par des Français, mais au même titre qu’on ne parle pas (enfin si) du « cinéma américain », on ne devrait pas s’étendre là-dessus. Et pour ceux qui rétorqueront que notre cinéma répond quand même à beaucoup de codes, je vous défie par exemple de regarder le long-métrage espagnol « Cuerpo de elite » de Joaquín Mazón, et d’oser me dire qu’il ne vous rappelle rien.

        L’article est sous forme de top 5, mais dresser un ordre m’a brisé le cœur (il est présenté du dernier au premier [clin d’œil pour la suite] parce que, OUI TOPITO, tout le monde se fiche du quatrième quand on connaît déjà le premier). Comme prendre des décisions est toujours ma difficulté éternelle, je vous explique comment j’ai fonctionné (que de complications). J’ai pris ma cinéthèque à la rubrique « excellentes surprises » et comme je venais d’écouter un podcast sur cette question du cinéma bien de chez nous, j’ai sélectionné selon ce critère, parce que j’adore l’ironie (coucou Rousseau). Ils sont également sortis dans les cinq dernières années, parce que pour restreindre mes options et bien j’ai choisi l’extrême contemporanéité ; je me suis aussi assurée de la mixité des réalisateurs. Enfin, ils ont tous fait, je trouve, beaucoup trop peu d’entrées en salles, mais hormis ce critère vaguement subjectif j’ai essayé, pour favoriser l’esprit de découverte, d’en prendre des « moins connus » du grand public sans qu’ils soient trop obscurs pour autant, là n’est pas le but. Ce ne sont pas des analyses de plans ou autres procédés (si cela vous intéresse vous pouvez cependant contacter le SAV), plutôt des avis bordéliques mais exaltés. Bref, je vais essayer ici de vous donner envie de vous pencher sur ces cinq œuvres par plaisir et je suis désolée pour cette rédaction moins teintée d’humour que d’habitude, je vous fais un câlin pour compenser. (Diantre que cette introduction était tordue.)

     

      5

    Primaire

    d’Hélène Angel, 2017

     

      C’est sûrement celui du top qui vous parlera le plus, il est en effet le plus récent et celui dont les médias ont fait quelque étalage notable. Je voulais me vider la tête de ces longues heures d’étude sur Henri II et ai donc logiquement choisi d’aller voir un film sur l’école parce que visiblement, j’aime souffrir. J’ai donc emmené ma machine à popcorn (bonjour Madeline) sous mon bras et nous sommes parties un peu au hasard à la découverte de Sara Forestier qui tente d’être la meilleure employée du mois sur le mur des maîtresses, tout en risquant le burn-out. Et si vous avez bien suivi, ce fut une très bonne surprise. Peut-être pas de celles qui vous laissent un souvenir impérissable mais plutôt un grand sentiment de tendresse tout aussi chérissable. C’est une réalité qui parle à la majorité d’entre nous (Manon, captain obvious depuis 1998) et un sujet en soi pas révolutionnaire, mais cet envers du décor trouve tout son intérêt dans sa justesse. Quand on est en partie responsable de ce que deviendront les élèves, quelles sont les vraies prérogatives, quand est-ce que l’aide devient trop intrusive, comment ne rien faire face à des parents négligents ? Qui a le droit d’faire ça à des enfants qui croient vraiment c’que disent les grands (PATRIIIIIIIICK) ? Bref, ne pas s’impliquer émotionnellement face à ces petites bouilles (plus ou moins) mignonnes est presque impossible et la réalisatrice témoigne d’une vraie intelligence dans son travail d’immersion (sans compter la présence de Vincenounet). Jamais pathétique bien que nécessairement intense par moments, l’oeuvre fait prendre conscience à tout un chacun de la complexité de la profession et que lorsque l’enseignant doit gérer toute une classe, il ne peut pas satisfaire ni tous les parents, ni tous les enfants, ni tous les voisins de machine à café. L’enfance à l’écran n’est pas édulcorée, elle est douce, adorable mais aussi sans concessions et telle un phare dans la nuit l’actrice principale brille pour éclairer tous ces petits bateaux perdus en quête de leur chemin (mais quelle poésie meïn gödh). Au niveau de la réalisation pure, c’est la vérité des tons des décors et des lumières qui se voit favorisée, pas de grands éclairs rouges lors des dilemmes intérieurs ni de giclées de sang exagérées quand un genou s’égratigne. Mais l’ensemble est très efficace, on nous propose un retour sur les bancs de l’autre côté du miroir (et on repense au stagiaire qui est en deuxième année de licence et qui veut devenir professeur de latin pour les CP) et c’est une expérience des plus réussies qui stimule judicieusement notre compassion, notre nostalgie, et notre envie de mordiller des cubes alphabet.

     

    ♦ 4 ♦

    Une histoire banale

    d’Audrey Estrougo, 2013

     

        Je suis tombée sur celui-ci parce que je faisais des recherches sur la représentation du viol au cinéma, déjà parce que j’aime les sujets rigolos et ensuite parce que, même si ce n’est pas la question, son manque de traitement est dramatique, vraiment. Sa sobriété m’a rapidement convaincue, en-dehors du fait que son auteure avait déjà réalisé Toi, moi, les autres que je suis à la limite de vénérer (même si malheureusement il semble que je sois la seule, je connais toutes les chorégraphies par cœur, « quelques étoiles filaaaaantes »). C’est l’histoire d’une fille qui se fait violer. Et bien qu’elle n’en ressorte pas physiquement morte, elle n’arrive plus à vivre normalement sous le poids de toutes les conséquences qui l’assomment. Je tiens à préciser tout de suite que l’on voit la scène de son agression et même si ce n’est pas à proprement parler un massacre, c’est, pour moi en tout cas, l’une des situations les plus intenables à regarder en règle générale. Toutes les réactions qui découlent d’un tel choc défilent les unes après les autres, à mesure que l’héroïne pense pouvoir vivre avec, veut mourir, veut en parler, veut se taire. C’est brutal parce que l’événement même l’est, mais ne le regardez pas si vous attendez un ton de tragédie très lourd ou une horreur flagrante, les images sont violentes parce qu’elles ne le sont pas tant pour nous mais bien pour la victime. La caméra veut faire comprendre que si elle ne s’était pas posée là, personne n’aurait prêté attention au monde de cette fille qui s’écroule (ce n’est pas une histoire vraie, et pourtant). Le spectateur a beau assister à tout ce qu’elle traverse, il est le témoin impuissant de son mal-être et de ses soubresauts déchirants sans pouvoir comprendre vraiment le désespoir de ses pensées, certes plongé dans leurs méandres mais n’en saisissant que la surface. Il s’approche du documentaire (par sa conception aussi d’ailleurs, le projet serait mort sans la ténacité de l’artiste et 8000 euros amassés grâce à l’Internet) par son côté frontal, profondément crédible mais la sensibilité qui s’en dégage fait cependant la part belle à une émotion à fleur de peau. Je pense que pour environ 2000 raisons, il faut avoir vu au moins un film de ce type, je ne les énumèrerai pas parce que d’abord, 2000 ce serait trop long mais surtout pour éviter des discours usés. Marie Denarnaud livre une interprétation très franche dans la simplicité, elle devient entièrement cette femme torturée, elle est remarquable. C’est en traitant avec une sincérité féroce d’un sujet aussi grave (à l’engagement inévitable) que la cinéaste touche au cœur, et c’est très bon, percutant.

     

    ♦ 3 ♦

    Les premiers, les derniers

    de Bouli Lanners, 2016

     

        Qu’est-ce que j’ai pu rechigner à regarder celui-ci. Il était dans ma pile à voir depuis des mois, mais les mots « chasseurs de prime » et « dettes » me le faisaient ignorer encore et toujours puisque je considérais en avoir trop vu à ce sujet. Alors quand je me suis enfin décidée à le lancer, je l’ai fait en grognant et en maltraitant ma tasse de thé (une poleo menta dé-li-cieu-se). Et j’ai regretté, j’ai regretté de ne pas l’avoir regardé plus tôt, d’avoir perdu autant de temps sans connaître cette fable. Oubliez tout de suite les termes que j’ai cités plus tôt parce qu’ils n’en sont absolument pas l’incarnation, sinon un élément secondaire. Mon esprit n’a pas dévié une seconde de l’intrigue alors que j’ai quasiment tout le temps au moins une pensée volée pour un roux en chemise à carreaux par film, et cela n’a pas été le cas ici. Cette œuvre est d’une poésie ahurissante et n’ayez pas peur si je vous dis que c’est une méditation sur la nature humaine, sur qui sont les prédateurs, sur où se trouve la bonté. Il est excellent, acteurs splendides et réalisation frappante. Sans transition je ne vais pas tourner autour du pot plus longtemps, je dois vous avouer quelque chose. La performance de David Murgia. Je. Argh. Je ne sais pas depuis combien de temps je n’avais pas été à ce point stupéfaite, il est apparu à l’écran et soudain la pureté de son personnage m’a figée sur place. Il est un rôle secondaire avec son amoureuse (terme enfantin choisi à dessein) incarnée par Aurore Broutin, absolument brillante aussi, cependant pour moi il est le charme, le cœur et l’âme du récit. Il est galactique. Sa gentillesse, l’amour inconditionnel dont il déborde, sa façon de penser aux nuances de folie font de lui un petit arc-en-ciel magique à l’écran. Bien sûr mon ressenti est subjectif, mais je pense que n’importe qui en le visionnant serait suspendu jusqu’à la dernière seconde, en se mordant la lèvre inférieure à la Anastasia Steele, pour s’assurer du succès de sa quête. JE L’AIME. Je ne pense pas que beaucoup de textes ne lui soient dédiés alors si tu passes par-là, merci pour ton travail et s’il-te-plait, viens manger une gaufre avec moi. Ensuite, c’est un petit voyage dans notre monde, concerné par des questions d’actualité, mais dont l’atmosphère semble irréelle grâce à la beauté des images et le traitement des idées choisi. Les niveaux de lecture sont d’une grande richesse et j’ai bien conscience de ne pas vous avoir proposé de résumé mais la surprise est de mise, l’histoire ne se raconte pas, je ne suis pas la mère Castor. Il n’avait rien pour sortir du lot et pourtant tout chez lui m’enchante, il est éblouissant. Je suis éblouie. J’ai de la lumière dans les yeux. Mes lunettes m’en tombent. Ok j’arrête.

     

    ♦ 2 ♦

    Les deux amis

    de Louis Garrel, 2015

     

        Oui toi qui me pointe du doigt, celui-ci est plus « bobo » que les autres, espèce d’individu plein de clichés dont je parlais au début. Que l’on se mette d’accord tout de suite, pour moi Louis Garrel est une raison suffisante pour voir, écouter, lire voire manger n’importe quoi, tant je le trouve incandescent. Malgré notre relation malsaine et une hâte dévorante, j’ai gardé en l’abordant une certaine réserve de peur qu’il cède aux défauts qu’on a tendance à lui relever. Il aurait pu être trop hermétique, trop bancal, trop expérimental, mais il ne l’a pas été. Deux amis connaissent une fille, ils sont tous les trois complexes, emplis de sentiments, très liés les uns et autres et subissant leurs propres contradictions. La scène de la gare. La scène de la danse. La scène de la chambre d’hôtel. Autant de montées en puissance subites, de coups en pleine poitrine portés par des besoins viscéraux des personnages de s’exprimer. C’est un moment de beauté débridée et d’honnêteté réfléchie soutenu par une photographie très assurée pour un premier film, certes je suis sûrement la seule à comprendre ce que je dis mais je joue du piano debout. J’avoue que j’ai un peu de mal à exprimer ce que je ressens quant à ce film parce que c’est une question de sensibilité et que si j’essayais de mettre des mots, sur la mienne on obtiendrait un Larousse sous LSD. Pour continuer plus clairement, je pense que ce qui m’a frappée c’est la puissance à laquelle je ne m’attendais pas, l’intelligence qui s’en dégage lui est propre et je vous conseille de constater par vous-même à quel point tous ces personnages bouillonnent, sont électriques. Malgré tout il y a un certain décalage qui soutient la fiction, leurs actes paraissent parfois improbables, et même si ce que les critiques tendent à saluer est le portrait fait d’une amitié, de mon point de vue tous ces rôles sont certes très humains mais s’approchent aussi d’incarnations de pensées plus allégoriques (oui, j’ai fait L). Ce que les acteurs offrent est grandiose, humain, le travail était d’ailleurs tellement exigeant qu’il a poussé à la rupture le couple Garrel-Farahani (minute radio-potins : il était apparemment très directif et a vraiment heurté l’actrice, et sur le ton de la plaisanterie je dirais que je le recadrerais bien si je pouvais mouahahaha). Ils sont tous les trois étincelants et pourtant je suis moins sensible d’ordinaire au travail de Vincent Macaigne, et je trouve que c’est le genre d’œuvre qui donne envie d’en découvrir plus sur la filmographie de tous ces talents. C’est un long-métrage extraordinaire qui donne un nouveau souffle à ce thème si répandu, plein de surprises et de non-dits dévorants, un moment de cinéma qui vous marque si vous lui ouvrez votre cœur.

     

    ♦ 1 ♦

    Nocturama

    de Bertrand Bonello, 2016

     

        THAT MOVIE. Je le précise rapidement, en cherchant la date de sortie précise j’ai vu que Télérama lui avait donné cinq étoiles, alors je ne sais pas si c’est un avantage ou non pour vous, mais c’est tellement rare que cela mérite d’être souligné. Je pense qu’il est passé instantanément dans mes favoris personnels alors c’est forcément un gage de qualité, ne me contredisez-pas, je sais où vous vivez. Je ne vais pas vous raconter ce dont il parle et je vous INTERDIS de chercher un résumé, sachez simplement que c’est l’histoire d’un groupe de jeunes, avant et après la réalisation de leur projet. Après l’avoir vu, je peux vous assurer que vous hésiterez à remettre un pied dehors pendant longtemps, il est glacial malgré des images brûlantes, un choc qui se renouvelle à chaque plan, à chaque fois que s’enclenche l’évènement suivant. Comment un tel phénomène a-t-il pu passer aussi inaperçu ? Quelque chose comme 46 000 entrées, je suis dépassée. Les acteurs sont tous aussi touchants que malsains, campant des personnages brisés, influençables et révoltés qui font et subissent de terribles choses éblouis par de flamboyantes illusions. La lumière, les couleurs, la musique, tout est d’une précision déroutante, une fois emporté dans cette machine il est impossible pour le spectateur d’en sortir, pris au piège dans cet univers qui est le nôtre mais qui semble parallèle. Tellement de sentiments contradictoires se sont succédés pour moi, allant de l’angoisse à la compassion en passant par la panique, ce film est une boucle infernale dont on ne ressort pas indemne. Le scénario est extrêmement original et même si vous le détestez, vous ne pouvez pas lui retirer qu’il ne ressemble à rien d’autre. J’aimais beaucoup Bertrand Bonello avant (même si la rétrospective sur lui était pendant le concours blanc SA MÈRE), alors autant vous dire que ce long-métrage fait de lui à mes yeux un incontournable. Je pourrais m’étendre des heures sur chacune des secondes le composant mais tout ce que j’ai envie de faire c’est de vous tirer les oreilles (littéralement, par les lobes) jusqu’à ce que vous éteigniez toutes les lumières et le mettiez sur votre poste de télévision. Son identité est exceptionnelle et j’adore tout ce qui le concerne, il me bouleverse, m’inquiète, m’attrape et ne me lâche plus. C’est au fur et à mesure que l’on comprend ce qui se trame, et il faut également noter qu’il nous pousse à nous questionner de façon vraiment perturbante. C’est terrible de ne pas pouvoir spoiler (Roméo meurt à la fin) mais vous comprendrez en le voyant que nos notions du bien et du mal sont on ne peut plus chamboulées. C’est un genre de miracle.

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  • Commentaires

    1
    Mercredi 30 Août 2017 à 10:16

    Quand même, une pensée pour Ed à chaque film ? Ça fait beaucoup... :p 

    Et dis moi, tu les as en DVD ces petits trésors ? :3

      • Vendredi 1er Septembre 2017 à 15:53

        Jamais trop ♥

        Je possède "Nocturama" que je te prête quand tu veux glasses

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    2
    Vendredi 1er Septembre 2017 à 17:02

    Great ! ça me va, et je te rendrai les deux autres comme ça ;)

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